NBA Rewind #7 : Kobe vs Arenas, Saison 2006-2007, récit d’un duel d’anthologie

À la manière d’une cassette vidéo ou audio, Clutch Time rembobine l’histoire de la balle orange et vous replonge dans les moments les plus marquants de ce sport, d’hier à aujourd’hui.

Cette semaine, notre escapade temporelle nous ramène en décembre 2006 et un soir de match entre les Los Angeles Lakers de Kobe Bryant et les Washington Wizards de Gilbert Arenas, rencontre durant laquelle les deux franchise players vont tutoyer les sommets, célébrant les fêtes de Noël avec une semaine d’avance.

L’agent Zéro face au Black Mamba

Les Lakers, entre déclin et reconstruction

L’époque où le Shaq’ et Kobe roulaient sur la ligue est révolue. Le MVP de la saison 1999-2000 a quitté le navire californien en 2004 après une énième brouille avec le Black Mamba. Du coup l’arrière Laker est désormais seul aux commandes d’une franchise en pleine reconstruction et qui peine à retrouver des résultats convaincants. Le passage de Rudy Tomjanovich fut assez chaotique sur le plan sportif. Avec un effectif vieillissant après quatre finales NBA au début des années 2000, la franchise de Jerry Buss tente de se reconstruire en se séparant de ses dinosaures (Malone, Payton, Grant et Russell) et en misant sur une nouvelle garde pour entourer son joyau.

Pourtant le casting est loin de faire rêver. Les Lakers vont certes récupérer des éléments dans le trade du Shaq’ avec Miami, mais des profils très loin de satisfaire le zen Master, Phil Jackson, qui quittera ses fonctions en 2004. Côté draft me diriez-vous ? Rien de bien folichon non plus entre 2003 et 2006. En sélectionnant Luke Walton, Brian Cook, Sasha Vujačić, Ronny Turiaf, Andrew Bynum ou encore Jordan Farmar et en ajoutant les signatures du vétéran Vlade Divac, Smush Parker, Kwame Brown, Aaron McKie et Vladimir Radmanović, les Lakers post-threepeat font désormais plus sourire que rêver.

Les Wizards, un retour au sommet

Passé le jubilé de Michael Jordan entre 2001 et 2003, les Wizards se sont depuis bâtis une nouvelle image à l’Est. Ernie Grunfeld a décidé de miser sur le joueur ayant connu la meilleure progression de l’année 2003, Gilbert Arenas. Autour de l’Agent Zéro, Eddie Jordan va se séparer de Jerry Stackhouse, Kwame Brown et Larry Hughes pour construire un effectif plus ambitieux avec Antawn Jamison, Caron Butler ou encore Brendan Haywood. Résultat la franchise du capitole va progressivement retrouver des couleurs, de la 13ème place en 2004 à la cinquième place lors des deux exercices suivants.

Logo des Washington Wizards de 1997 à 2007

Un revirement sportif bien venu pour lequel l’ancien joueur des Warriors a énormément contribué, en témoigne ses performances et son rendement offensif. En passant d’un peu plus de 19 points par match lors de sa première année à Washington à plus de 29 points en 2006 sur toute la saison régulière, le meneur de jeu est incontestablement le facteur X de la renaissance des Wizards. En playoffs, Arenas culmine même à 34 points inscrits lors de la campagne 2006 mais se heurte successivement au Heat de Wade puis les Cavs de LeBron au cours des deux premières campagnes des Wizards.

Le contexte du match

Pour l’exercice 2006-2007, Washington et Los Angeles connaissent des débuts bien différents. Les Lakers ont démarré la saison avec seize victoires pour seulement sept défaites, soit le meilleur démarrage de la franchise depuis la saison 2003-04. De son côté Gilbert Arenas brille mais gagne très peu de matchs avec les Wizards notamment après un mois de novembre épouvantable (seulement cinq succès en quatorze rencontres). À la mi-décembre, la balance penche donc en faveur des Lakers qui semblent plus en réussite et mieux partis dans la saison régulière, même si les Wizards retrouvent des sensations et une dynamique de victoire.

La rivalité entre les Wizards et Kobe

Alors certes ici on ne parle pas de rivalité au sens historique et sportif du terme mais plus d’une rivalité anecdotique bien que toutefois intéressante, entre le Black Mamba et Washington. Il faut remonter en 2003, à l’époque His Airness vient de faire son dernier come-back en NBA dans un rôle de joueur-entraîneur-dirigeant aux Wizards. Le sextuple champion vient de croiser à deux reprises la route du jeune Kobe pour qui Jordan est un modèle sportif, les Lakers remportants les deux premières confrontations. Mais lors de leur dernier face-à-face, Washington l’emporta d’un point à domicile (100-99) et Michael Jordan usera d’un dernier trashtalk avec le joueur de 24 ans qu’on présente comme son plus proche successeur :

Tu auras beau mettre des Jordan à tes pieds, tu ne pourras jamais marcher dans mes pas

Basket USA

Une punchline qui va piquer au vif l’arrière des Lakers qui ruminera pendant plusieurs jours les propos de son idole et qui prendra un malin plaisir à lui coller 55 points dans la vue lors de leur dernier duel (victoire 108-94). Tel un psychopathe, Kobe inscrira près de trente points par match face aux Wizards les saisons suivantes se heurtant souvent néanmoins à l’Agent Zéro.

Papy Jordan fait dans les douceurs

Une soirée mémorable

En cette soirée du 17 décembre, les Lakers reçoivent Washington pour leur premier duel de la saison. Au moment d’entamer un road-trip d’une semaine, les Wizards arrivent avec le plein de confiance après deux victoires face à Denver et le Heat, tandis que les angeliños sortent de dernières rencontres éprouvantes avec une double prolongation face à Houston. Les protagonistes avancent en ordre dispersé, les coéquipiers de Arenas sont encore en rodage, notamment avec leur adresse, et bien que Washington fasse partie des meilleures attaques, la défense n’est pas vraiment au coeur des préoccupations d’Eddie Jordan. Mais les titulaires et les second-units répondent présents.

Pour les Lakers c’est une toute autre affaire. Privés de leur deuxième solution en attaque, Lamar Odom, Kobe Bryant doit sortir la démultiplié avec de gros cartons offensifs, en témoigne les 53 points claqués face aux Rockets. Seul joueur donnant l’impression d’être à la hauteur depuis le début de la saison, le No. 24 doit notamment composer avec le n°1 de draft 2001, Kwame Brown, Smush Parker ou encore de Luke Walton, des joueurs très loin des standards à leur poste respectif à l’époque.

Duel de pyromanes

Washington prend les devants

Le premier quart-temps tourne rapidement à l’avantage des visiteurs et du duo Arenas – Jamison qui en fait voir de toute les couleurs à un Kobe muselé en attaque et des Lakers maladroits d’entrée de jeu. Gilbert Arenas passe un premier quart-temps plutôt en réussite, enchaînant les relances rapides et les pénétrations en tête de raquette, sans inquiéter les défenseurs adverses. Son entente avec Antawn Jamison est également une des clés du premier quart-temps des Wizards. Malgré trois tentatives manquées derrière l’arc, Arenas régale par ses fulgurances et vient déjà d’inscrire quasiment la moitié des points de son équipe (26-20). Côté Lakers c’est l’ailier Vladimir Radmanović qui caracole avec déjà dix points.

La réponse de Kobe ne se fait pas attendre dès le début du deuxième quart-temps, avec deux tirs primés consécutifs. Plus adroit et altruiste, Bryant score 14 de ses 16 pions à la mi-temps dans ce quart-temps, tandis que Gilbert Arenas dévisse de loin (0/4) mais provoque des fautes adverses. Malgré tout, les Lakers sont encore derrière, incapables de tenir Jamison et les remplaçants. La marque se répartit entre Caron Butler, Brendan Haywood, Antonio Daniels et Roger Mason alors que l’écart au tableau d’affichage grandit (59-49). À la mi-temps Arenas et Jamison pointe à 17 points chacun contre 16 points pour Kobe et 15 pour Radmanović pour les hôtes.

Le début de la seconde mi-temps démarre comme le deuxième quart-temps, Kobe est dans un grand soir avec son adresse et score les premiers paniers de son équipe. Déchaîné à trois points (4/7), le snake ne fait pas encore la différence dans ce quart-temps malgré sa réussite (16 points), la faute à un Gilbert Arenas qui réagi dans les dernières minutes avec des fautes provoquées et un tir clutch à 30 secondes du buzzer. Arenas ajoute 12 unités à son compteur et règle la mire (29 points), secondé par Jamison (6 points) et DeShawn Stevenson (7 points) et sur un statu quo (31-31), les Wizards semblent tenir le match par le bon bout, tenants tête à un Kobe déchaîné depuis vingt minutes (32 points à 7/10 à 3pts).

Le sursaut des Lakers

Ce dernier quart-temps sonne comme une dernière chance pour les hommes de Phil Jackson. Kobe sur le banc pendant plusieurs minutes, les Wizards vont prendre jusqu’à dix-sept points d’avance jusqu’à deux trois points successifs de Farmar et Walton avant un temps-mort demandé par Eddie Jordan. Gilbert Arenas devient inarrêtable et démarre sur les chapeaux de roues ce quart-temps avec neuf points en quatre minutes. De retour sur le parquet, Kobe mettra pourtant plusieurs minutes avant d’inscrire un panier. Chargé de défendre sur Arenas, Kobe prend son job avec sérieux. Même si le meneur semble indéfendable ce soir, Washington verra à tour de rôle Kobe, Radmanović, Bynum et surtout Farmar revenir au score.

Après une passe de Kobe pour Walton (la septième de la soirée), revoilà les Lakers à -4 avec moins de 45 secondes au tableau d’affichage dans le money-time. Arenas est toujours intenable et en inscrivant ses 43 et 44ème points sur lancers-francs, Washington est toujours devant (125-120). Mais c’est mal connaître le Black Mamba qui va lui répondre d’un lay-up avec la faute en prime. Nouveau temps-morts des Wizards, Gilbert Arenas peut hériter du ballon pour la gagne mais bien isolé en défense, le cuir tombe dans les mains de Stevenson sur qui Kobe se jette en défense et provoque la faute. L’arrière ne rentre qu’un lancer sur deux et les Lakers hérite d’une possession pour égaliser. Étonnement altruiste, Kobe remonte le terrain, pris à deux en défense, il transmet le ballon à Brian Cook qui feinte Arenas et envoi un tir primé pour égaliser à 126 partout. Une dernière possession et un tir manqué par Arenas envoi les deux équipes en prolongations.

La lumière divine

Malgré un tir de la victoire au bout des doigts raté, Gilbert Arenas ne baisse pas pavillon. Touché par la grâce, le meneur all-star va justifier son statut en achevant les californiens. D’un splendide tir à trois point sur la tête d’un Kobe dépassé, Gilbert enchaîne par un lancer qui porte le compteur à 50 points, record en carrière pour l’Agent Zéro. On en reste là ? Pas moyen !
Après un tir primé de Sasha Vujačić, Arenas remet le couvert et enfonce les Lakers avec deux lay-ups et la faute en prime. Un nouveau tir primé et deux lancers plus tard, Arenas rend une copie FA-BU-LEU-SE avec 60 points, 8 rebonds et 8 passes pour trois pertes de balle. Avec une prolongation menée d’une main de maître, Gilbert Arenas restera dans les annales comme le premier joueur depuis Wilt Chamberlain à avoir inscrit 60 points aux Lakers depuis plus de quarante ans et effaçant des tablettes le record de sa franchise de Earl Monroe (54 points).

Les Wizards s’imposent au final 147 à 141 face à des Lakers incapables de contenir l’incendie Arenas qui inscrira 16 points en prolongation, dont 14 consécutifs, devenant le meilleur marqueur de l’histoire sur une prolongation (jusqu’à Stephen Curry en 2017) et provoquant un nombre de fautes hallucinant (21/27 aux LF). Bryant qui n’inscrira que quatre points en prolongation doit s’incliner mais terminera tout de même avec une belle feuille de match (45pts, 10 ast, 8 rbd). Au-delà de ce duel épique entre deux des meilleurs joueurs offensifs de l’époque, Gilbert Arenas a pu également compter sur ses partenaires au rendez-vous, de Caron Butler (27 points, 5 passes) à Antawn Jamison (25 points, 13 rebonds) et DeShawn Stevenson (15 points).

Les retrouvailles en mars 2007 entre les deux stars tournera cette fois en faveur du Laker (118 – 102) malgré un nouveau duel explosif (39 points pour Kobe et 37 pour Arenas), un mois seulement avant la grave blessure de l’Agent Zéro qui plongera le joueur dans une lente et douloureuse déchéance financière et sportive jusqu’à quitter la NBA en 2012 pour partir évoluer en Chine, aux Shanghai Sharks et terminer sa carrière de basketteur professionnel à seulement trente et un ans.

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