Rétro draft 2000: zoom sur Kenyon Martin

Ah, la draft NBA. Un des moments les plus excitants de l’année pour les fans de la balle orange, mais surtout une étape incontournable dans la carrière d’un joueur. En attendant de voir Zion dépecer les défenses adverses, ClutchTime vous propose un focus sur plusieurs classes de draft, dans lequel nous décortiquerons la carrière de 3 rookies. Dans ce premier opus consacré à l’édition 2000, on se concentrera sur Kenyon Martin, la machine à dunker des New Jersey Nets.

Le Contexte

En 2000, la NBA est en pleine révolution. Après avoir glané 6 bagues de champion NBA, Michael Jordan tire sa révérence et laisse la porte ouverte à l’adversité. Pour la première fois depuis 1980 et le début de la rivalité Magic-Bird, la Ligue se cherche de nouvelles têtes d’affiche. Et la tendance ira vers les intérieurs. Tim Duncan et David Robinson sont les grands artisans du titre 99 des Spurs, de par leur complémentarité mais surtout grâce à leur palette technique et leur science du jeu au dessus de la moyenne.

Shaquille O’Neal domine déjà la plupart des raquettes, et lors de la saison 1999-2000, il marchera sur toute la NBA. 29,7 points, 13,6 rebonds et 3 contres en 79 matchs, un titre de MVP acquis presque à l’unanimité, et un sweep sur les Pacers d’Indiana pour ramener la coupe à Los Angeles, 12 ans après le dernier sacre des Lakers. Il est clair que les General Managers d’à peu-près toutes les franchises veulent constituer leur équipe autour d’un joueur qui peut dominer les raquettes comme Shaq ou Timmy. Plus précisément, on attend un intérieur capable d’être aussi bon en attaque qu’en défense. Une qualité que la plupart des prospects choisis tout en haut dans les drafts suivantes ne pourront apporter.

La draft

Minneapolis, 28 juin 2000.

En jetant un premier regard à cette cuvée, on ne trouve aucun joueur « majeur » des années 2000. Et les statistiques sont là pour le confirmer. Seul 3 parmi les 59 joueurs sélectionnés cette année là deviendront All-Star: Kenyon Martin, Michael Redd et Jamaal Magloire. Et seulement 15 joueurs auront joué au moins une décennie. Dernière stat significative: seulement 9 joueurs draftés cette année-là dépasseront les 10 points de moyenne en carrière… La draft 2000 est considérée (à juste titre) comme une des pires de l’histoire.

Episode 1: Kenyon Martin

Kenyon Martin appelé par David Stern lors de la draft.

Sans surprise, le 1er appelé par le Commissioner David Stern est Kenyon Martin, choisi par les Nets de New Jersey. Cet ailier fort de 2,06m a ébloui les observateurs lors de son année senior avec Cincinnati, à coup de alley-oop et de dunks enragés. Sa ligne de stats parle pour lui: 19 points, presque 10 rebonds et 3 contres par match. Robuste, agile et rempli d’énergie, on lui prédit un avenir doré si son corps le laisse tranquille. Il s’est brisé la jambe droite lors du tournoi universitaire Conférence USA au mois de mars et des doutes subsistent quant à sa santé physique. 

Le début de carrière de Kenyon Martin représente sans doute sa meilleure période, en partie grâce à son association avec Jason Kidd. Echangé par Phoenix contre Stephon Marbury, l’arrivée du meneur est une véritable aubaine pour l’enfant du Michigan. K-Mart se régale de l’altruisme et du légendaire sens de la passe dont est doté Mr Triple Double. Les deux compères se trouvent les yeux fermés et illuminent la Continental Airlines Arena ainsi que les Top 10.

Tellement de violence…

Ajoutez à cela des seconds couteaux comme le tout jeune Richard Jefferson, Kerry Kittles ou Keith Van Horn et vous obtenez un jeu rapide doublé d’une défense féroce. La preuve, lors des saisons 2002 et 2003, les Nets sont l’équipe qui encaisse le moins de points sur 100 possessions.

Couverture du magazine SLAM, paru en Mai 2002

Finalistes NBA lors de ces 2 saisons, les Nets ont vaincu le syndrome de la lose (aucune série de playoffs gagnée de 1984 à 2002) et s’imposent comme de solides prétendants au trône. Certes, à l’époque, la conférence Est est d’une faiblesse abyssale, mais cela n’enlève rien à la qualité de l’effectif new-yorkais. K-Mart est comme un poisson dans l’eau.

Les Nets font imploser la Continental Airlines Arena face aux Celtics en 2002 et ne sont plus très loin des finales NBA

  Malheureusement, les deux équipes qu’ils ont affrontées en finales sont ce qui se fait de mieux au début des années 2000. Dans le game 4 des finales 2002 face aux Lakers, K-Mart fera sans doute sa meilleure performance en carrière: 35 points, 11 rebonds, des dunks rageurs et une envie débordante de gagner au moins un match à la maison, son équipe étant menée 3-0. Trop juste face à une armada en lice pour un triplé historique. Pas beaucoup de suspens dans ces finales mais les Nets sont maintenant une équipe redoutée. Ils sont passés d’une saison sans relief (26 victoires en 2001) aux finales NBA.

https://www.youtube.com/watch?v=JkbznJx98Wg&t=79s
Ses highlights contre les Lakers.

En 2003, Jason Kidd joue le meilleur basket exceptionnel, enchaîne les triple-double, et Kenyon Martin s’est logiquement affirmé comme étant son lieutenant. Sous leur impulsion, les Nets retrouvent les finales, après un sweep infligé aux Pistons. Ils y affrontent les Spurs, désireux d’offrir à leur légende David Robinson la fin de carrière qu’il mérite. Défaite logique 4-2, second titre en 4 ans pour les éperons et nouvelle désillusion pour les jours de coach Byron Scott. Lors du match 6, alors que Tim Duncan frôle le quadruple-double (21 pts, 20 rbs, 10 passes, 8 contres), Kenyon, verrouillé par la défense des Texans, termine avec un abominable 3/23 au shoot, pour 6 points… Voilà ce qui séparait K-Mart des plus grands intérieurs de l’époque. Il était doué et physiquement monté comme une armoire à glace, mais à certains moments il manquait terriblement de lucidité.

L’année 2003-2004 sera celle de la consécration sur le plan individuel, où il est désigné All-Star, grâce à des stats cette saison-là qui s’avèreront être les meilleures de sa carrière: 16,7 pts, 9,5 rbs à 49% au shoot.

La sélection All-Star de la conférence Est. Kenyon Martin est tout à gauche.

En post-season, les Nets tombent cette fois en demi-finales de conférence contre les futurs champions, les Detroit Pistons. Une série exceptionnelle, qui montre bien que les new-yorkais n’étaient pas à prendre à la légère. A 2-2, les deux équipes s’affrontent dans un game 5 au mythique Palace of Auburn Hills de Detroit, qui fera basculer le momentum d’un côté comme de l’autre. On aura droit à 3 prolongations, du jamais vu en playoffs depuis 1993. Les Nets s’en sortent (127-120) dans une fin de match irrespirable. On parle encore beaucoup aujourd’hui du fameux shoot de Chauncey Billups pour arracher la première prolongation, on ne précise que trop rarement le fait que les Nets ont fait preuve d’une force de caractère incroyable dans ce match. Finalement sorti pour 6 fautes, K-Mart aura bien contribué avec 22 points et 9 rebonds, même si Brian Scalabrine (oui oui!) est le facteur X inattendu de ce match avec 17 points, à 4/4 à 3 points.

Le shoot miraculeux de Chauncey Billups. On ne l’appelait pas « Mr Big Shot » pour rien.

Malheureusement les Nets s’écrouleront totalement lors des matchs 6 et 7 et sortiront la tête basse. Ce seront les derniers moments de Kenyon Martin sous le maillot des Nets..

Le 15 juillet 2004, Kenyon Martin est envoyé aux Denver Nuggets contre trois choix de 1er tour de draft. C’est le début de la seconde partie de carrière de K-Mart. Et la tunique bleue des Nuggets lui va tout aussi bien. Il forme une raquette alléchante en compagnie de Marcus Camby. L’équipe est bien sur construite autour de la jeune star Carmelo Anthony, et le coach George Karl est unanimement reconnu comme un grand coach NBA.

Kevin Martin entre Vince Carter (à gauche) et son ancien partenaire Jason Kidd (à droite)

La première saison de K-Mart dans les rocheuses est encourageante et ses stats ne déclinent pas. Mais à l’issue de la saison 2004-2005 lors de laquelle les Nuggets sont sortis au premier tour par les Spurs, Kenyon est opéré pour une micro-fracture du genou gauche. L’année suivante il rate 26 matchs en raison d’une tendinite au même genou. Quand il retrouve les parquets, juste avant le 1er tour des playoffs contre les Clippers, il a perdu sa place dans le 5 de départ au profit de Francisco Elson. Après la défaite dans le game 1, Martin supplie coach Karl de le remettre dans le starting five après un match quelconque de Elson (0 pts en 15 minutes), mais le coach refuse. Frustré, Martin ne veux pas jouer la deuxième mi-temps du game 2. Conséquence: il est suspendu pour le reste des playoffs pour conduite préjudiciable à l’équipe. 

K-Mart et coach Karl.


Début 2006, nouveau coup dur pour K-Mart: après 2 petits matchs de saison régulière, il doit subir une opération pour la même micro-fracture, cette fois au genou droit, et met déjà un terme à sa saison. Le début de la fin pour Martin. Après 7 saisons faites de hauts et surtout de bas, Kenyon s’engage en 2011 avec l’équipe chinoise des Flying Tigers de Xingiang , au moment du lock-out qui frappe la NBA. Il touche le pactole et devient le joueur le mieux payé de l’histoire de la ligue Chinoise. Mais après seulement 12 matchs disputés, il est libéré de son contrat.

Après une pige anecdotique chez les Clippers de Los Angeles, Martin signe en 2013 chez les New York Knicks, initialement pour un contrat de 10 jours. Ses bonnes performances, la blessure du titulaire habituel Tyson Chandler et son entente avec un certain Jason Kidd le font prolonger jusqu’à la fin de la saison, puis pour la saison 2013-2014. Chez les Knicks, on retrouve par séquence l’intérieur puissant et sur-vitaminé qui faisait des ravages chez les Nets.

Les highlights de Kenyon Martin sous le maillot des Knicks.

Après un contrat courte durée et 11 petits matchs chez les Milwaukee Bucks, Kenyon Martin annonce sa retraite sportive le 3 juillet 2015.

Du dunk, de la rage et encore du dunk.

Que retenir de ce joueur? 757 matchs de saison régulière, 112 en playoffs, une moyenne de 12 points et 6 rebonds. Trop peu pour un numéro 1 de draft? Si on ne retiens que sa première partie de carrière, chez les Nets et au début de son aventure chez les Nuggets, on se souviendra d’un ailier fort puissant, explosif, capable de poser d’énormes problème aux raquettes adverses. Dommage que les Nets soient tombés sur les Lakers, Spurs et Pistons de l’époque. Jouer avec un meneur aussi talentueux que Jason Kidd aura facilité bien des choses à K-Mart, et on a le droit de se demander si le natif du Michigan aurait été all-star sans Mr Triple Double. Les blessures auront finalement gâché son passage à Denver et la suite de sa carrière, alors que son association avec Carmelo Anthony s’annonçait prometteuse. Verdict: pas le meilleur des numéro 1 de draft, mais loin d’être le pire.

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