La meilleure analyse concernant Victor Wembanyama pour sa seconde saison en NBA nous vient du canapé de Gilbert Arenas, et c’est Rashad McCants qui l’a énoncée – dommage que le bon Gil ne l’ait pas écouté, il aurait gagné du temps. McCants a tout dit en une phrase. La punchline. « Wemby fait des choses qu’on n’a jamais vues jusqu’à présent. Et on voudrait qu’il fasse du déjà vu. » Ce que fait Victor Wembanyama aujourd’hui, c’est un jeu à la KD et peut-être même Kobe Bryant avec un soupçon de Damian Lillard. Il développe sa zone de confort entre la ligne de demi-terrain et la ligne à trois-points, où tout peut arriver. Donc si vous pensiez qu’un joueur de 2,24m doit nécessairement jouer sous le cercle ou exclusivement dans la raquette et arrêter de tirer autant à 3 points, vous n’avez pas compris ce que cherche à faire Victor Wembanyama en NBA. Mais il finira par vous convaincre sur le terrain. Explications.
La recherche d’équilibre extérieur/intérieur
Idéalement, un joueur de basket doit être capable de prendre ce que lui offre la défense et réussir à marquer à chaque action, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Même si le panier n’est pas réussi, l’important est de se créer des opportunités de tir correctes en déjouant la défense et au bout du compte, les paniers finiront par entrer.
La domination par l’extérieur
Du haut de ses 2,24m, Victor Wembanyama est rarement gêné par la défense où qu’il soit sur le parquet. Dès qu’il tend les bras, il est plus haut que tout le monde; s’il se crée un minimum d’espace, aucun défenseur ne peut espérer toucher le ballon. Il est donc virtuellement libre de shooter d’où il veut. Et comme il sait dribbler en protégeant son ballon, avec son envergure, il sait parfaitement se déplacer en dribble sans risques. Seulement, à partir du moment où il a démontré une capacité à marquer à trois points, même si son adresse fluctue – et n’était pas au rendez-vous lors des Jeux Olympiques à Paris -, le gain potentiel en continuant à travailler et à shooter à trois points est évident. Pourquoi s’obstiner à lutter contre la défense toute entière pour accéder au panier et obtenir péniblement 2 points quand on peut tout simplement tirer de loin après un dribble ou deux et obtenir 3 points pratiquement sans effort? C’est pourquoi les Spurs l’encouragent à tirer autant qu’il le souhaite à trois points en match, car en plus de toutes ses tentatives à l’entrainement, c’est bien sur le terrain pendant des matches officiels contre une défense qu’il doit faire ses preuves et gagner en confiance. Plus il shoote, même s’il n’est pas toujours en réussite, plus il finira par y arriver. Il aura une familiarité, une aisance, des habitudes, et trouvera un certain confort. Et comme les Spurs n’ont pas grand chose à gagner sur le terrain actuellement, c’est le moment idéal de laisser leur franchise-player s’entrainer et se développer à son propre rythme. Les Spurs, qui comptent bien garder Wemby et ont tout misé sur lui, savent que leur avenir sportif en dépend.
Ne pas juger ses stats aujourd’hui
Lors de sa première et dernière saison en BetclicElite (première division professionnelle française) avec Boulogne-Levallois, avant de rejoindre la NBA, Victor Wembanyama a réussi 25% de ses tirs à trois points. Un taux jugé trop faible pour certains, qui serait effectivement médiocre s’il s’agissait de sa performance définitive en carrière. Mais c’est un chiffre à mettre en perspective sur sa carrière, pas un résultat définitif. Ce qui importe ici, ce ne sont pas ses tirs ratés, mais ses tirs réussis et ce qu’ils ont apporté en match. Un joueur de 2,24m qui réussit un tir à trois points par-dessus la défense en début de possession, c’est un bonus inestimable. Ce sont trois points rapides, gagnés sans effort, sans avoir à jouer. Et c’est très précieux. Imaginez s’il en met deux ou trois de suite, c’est un coup de massue sur l’équipe adverse et ça change la physionomie du match. Imaginez le jour où ce même joueur augmente son taux de réussite. Et enfin, c’est le meilleur rapport points/énergie dépensée. C’est presque trop facile. Du coup, il peut en mettre beaucoup. Et à tout moment, une fois la défense bien étirée pour tenter de le gêner à l’extérieur, cela ouvre des boulevards sur tout le terrain.
Ce qui frappait lors de sa dernière saison à Boulogne-Levallois, c’était l’impression de facilité de Victor Wembanyama et sa capacité à peser sur un match sans qu’on s’en rende compte. Il marque des paniers facilement, sur une claquette, sur un mouvement rapide en un-contre-un, sur un tir extérieur… Le tout sans donner l’impression qu’il accapare le ballon, sans gêner ses coéquipiers, sans jamais réclamer d’action pour lui. Il marque naturellement, dans la continuité du match. Et soudain, il affiche 20 points au compteur et son équipe à 10 points d’avance.
La partie facile à l’intérieur
Une fois sa présence extérieure établie, en forçant la défense à monter, si aucune solution évidente ne se présente, Victor Wembanyama a toujours l’option de partir en dribble ou de jouer le une-deux avec un coéquipier pour attaquer le cercle. Comme la défense est étirée, il y a plus d’espaces, c’est donc plus facile de couper vers l’intérieur, avec ou sans ballon. Et comme il le montre régulièrement, il sait parfaitement amorcer son dribble dans l’axe du cercle en tête de raquette et se balader le long de la ligne à trois points jusqu’au coin du terrain en quelques foulées, jouer alors son un-contre-un, face-à-face puis en post-up au poste bas, et soit passer le ballon, soit tenter sa chance à mi-distance. Ce faisant, il peut également feinter son adversaire en repartant en dribble vers la ligne des lancers-francs, revenir aussitôt si la ligne de fond se libère et atteindre le cercle en deux pas. La sureté de son dribble lui permet de se déplacer où il veut sans craindre de perdre le ballon. Contre Randle, Reid ou même Gobert (voir highlights ci-dessus contre Minnesota le 2 novembre), il se balade déjà, donc pas besoin d’insister sur ce secteur du jeu – ce n’est pas là sa plus grande marge de progression.