Comment le Miami Heat a-t-il remporté le Game 1 face aux Bucks ?

Par Benjamin Gisse (@MagicBenJohnson)


A quelques heures du 2ème match d’une série aussi palpitante que prévue, Milwaukee Bucks et Miami Heat se sont affrontés lors d’un premier match du second tour des Playoffs 2020. Alors que Milwaukee partait favori dans cette confrontation, Miami a su déjoué les pronostiques en s’imposant de 11 points face à la meilleure équipe de la saison régulière. Mais comment ont-ils fait ?


Du répondant… Beaucoup de répondant

Jouer contre Milwaukee, c’est constamment choisir son poison. Entre Giannis Antetokounmpo, Khris Middleton, Brook Lopez et les autres shooteurs fous à 3 points, il est impossible de contenir tout le monde.
Miami a fait son choix en se concentrant exclusivement sur la menace numéro 1 : le défenseur de l’année et candidat légitime au titre de MVP, Giannis Antetokounmpo.

Il faut dire que Miami peut se vanter d’être une des 4 équipes à avoir maintenu Giannis à moins de 15 points lors d’un match de saison régulière. Sur ces 4 matchs, Giannis a tenté le plus de tirs et joué le plus de minutes face au Heat. Et seul Miami s’est qualifié en playoffs parmi ces 4 adversaires…
Mais les Playoffs et la saison régulière n’ont rien à voir, on le sait, et on le répète assez souvent.

En assignant principalement Jae Crowder en mission face à lui, Miami ne s’attendait pas à trouver un « Giannis stopper ». Et cela n’a pas été le cas. Comme à son habitude, il a été compliqué de stopper Giannis en 1 contre 1.


Tableau représentant quelques statistiques de Giannis Antetokounmpo face au Miami Heat, en fonction de ses principaux face-à-face en défense


Mais la confrontation ne s’est pas jouée sur les 1 contre 1 de Giannis, bien au contraire. Coach Spoelstra a fait le choix de couper le plus possible l’accès au cercle, laissant les Bucks maître de leur destin sur la ligne à 3 points et doublant (ou triplant) quasiment toutes les tentatives du joueur grec de pénétration. Avec seulement 12 tirs tentés, il enregistre son plus faible total des playoffs et l’un des plus faibles de sa saison.

Offensive rating 1 de 99, 6 pertes de balle, 4/12 aux lancers-francs, 4 points en 12 minutes sur le dernier quart-temps… Mission accomplie pour Miami, avec un Giannis qui doit déléguer le scoring à d’autres joueurs.

Le répondant du Heat a été physique, mais aussi mental. Avec un impressionnant 1,39 points par possessions 2 à la suite d’un panier de Milwaukee, Miami n’a laissé aucune chance aux Bucks de creuser l’écart, les deux équipes se répondant souvent coup pour coup sur le terrain. Milwaukee n’a pas su gérer son avance, et n’a pas su prendre avantage de sa forte adresse à 3 points (16/35 sur le match).
Signe inquiétant pour la meilleure défense sur les points par possessions encaissés après avoir marqué un panier (0,99 sur la saison).

Pourtant, le 1er QT, malgré sa physionomie très particulière, a été outrageusement dominé par Milwaukee, avec 2 énormes « runs »3 , caractéristique de la locomotive Bucks depuis le début de saison : 15-6 puis 17-8, en un seul QT. Résultat : 40 points inscrits, 29 encaissés. +11, plus gros écart du match côté Bucks.

Derrière ? Miami remportera les 3 derniers QT et ne laissera pas Milwaukee faire un run plus gros qu’un petit 7-2 juste avant la mi-temps.
Ajustement tactique, volonté de gagner, peu importe… Le Heat a eu du répondant.

Jimmy Buckets, patron d’une seconde mi-temps maîtrisée

L’affaire était compliquée à la mi-temps. 63-60 pour les Bucks, menés par un tandem Middleton-Lopez absolument incroyable, compilant 40 des 63 points à eux deux. Côté Miami, c’est Goran Dragic qui tient la barre, avec 19 unités.

Miami tient mais Miami n’est pas à l’abri d’un sursaut offensif comme ils avaient pu le vivre lors de la défaite 116-130 dans la bulle face aux mêmes Bucks lors des seeding games 4 .

Si Goran n’inscrira « que » 8 points durant la seconde mi-temps, un homme sortira du lot et scellera la victoire du Heat : Jimmy Butler.

Souvent considéré ces dernières saisons comme un joueur clutch 5 , Jimmy a connu une saison compliquée dans ce domaine. Avec des pourcentages aux tirs très douteux dans les moments chauds, il a su renaître lors de ces playoffs, enregistrant des statistiques dignes de sa réputation, quasiment au niveau de ses playoffs avec Philadelphie l’an passé.


Graphique représentant les probabilités de victoires ajoutées dans les situations clutch de Jimmy Butler, sur les play-offs et en saison régulière depuis 2013


40 points inscrits. 27 en seconde mi-temps. 15 dans le dernier quart-temps.
Un record de points en carrière sur un match de playoffs pour lui, et une victoire en tant qu’outsider face à la meilleure équipe de la ligue. « Jimmy Buckets » ne pouvait pas rêver mieux, Miami est toujours invaincu sur cet exercice de playoffs, et lui est en pleine confiance.

Il est chez lui à Miami, dans cette fameuse culture du Heat à laquelle il s’identifie. Le fit est parfait, l’ambiance est excellente, la dynamique est très bonne.

3ème joueur de l’histoire de la franchise floridienne à scorer 40 points ou plus dans un match de playoffs (LeBron James & Dwyane Wade), il a été inarrêtable dans cette seconde mi-temps, à tous les niveaux.
6/8 aux tirs dans le 4ème quart-temps, accompagné de 2 lancers francs mis, et une impression de marcher sur l’eau, offensivement et défensivement.

Beaucoup de situations d’isolations en fin de match, preuve d’une confiance incroyable, tant Miami est l’une des équipes utilisant le moins l’isolation dans la NBA (pourcentage de 4,6% possessions se finissant par une isolation). C’était le moment « Jimmy B. ». Peut-être le seul de la série, peut-être le premier, mais il a saisi cette occasion, et le Miami Heat s’est imposé.

Sous les yeux de Pat Riley, présent pour la 1ère fois à un match à Orlando, cette performance n’a pas manqué de faire réagir sur Twitter, notamment avec l’apparation d’un petit message de la part d’un certain ex-coéquipier, sûrement nostalgique…

Une grosse présence dans la raquette

C’est l’un des facteurs X de cette série. Miami doit apprendre à gérer la domination défensive à l’intérieur des Bucks.
En encaissant seulement 38,7 points de moyenne dans la raquette sur la saison régulière, Milwaukee a été incroyablement efficace, poussant ses adversaires à prendre énormément de tirs à 3 points (39,3 tirs à 3 points tentés pour les adversaires des Bucks, soit plus que n’importe quelle autre équipe).

Le problème, c’est que Miami possède une armada de shooteurs à 3 points, menées par le sniper Duncan Robinson. Il ne serait pas très malin de les laisser tirer 40 fois à 3 points par match.
Ainsi, Milwaukee s’est directement adapté (31 tirs à 3 points tentés par Miami sur le G1), en contenant notamment parfaitement la menace offensive Duncan Robinson, qui a seulement tenté 4 tirs à 3 points, pour un réussi.

Cette performance défensive rappelle fortement le match 1 face aux Pacers au 1er tour, où le jeune joueur fit un 2/8 à 3 points dans la victoire contre Indiana, avant de s’adapter et de finir à 10/19 sur les 3 derniers matchs de la série.

En refusant le plus possible les tirs longue distance, Coach Budenholzer savait quelque chose : l’accès au cercle sera beaucoup plus simple pour Miami.

Résultat sans appel : alors qu’ils encaissaient 27,6 points par match dans la raquette depuis le début des playoffs, Milwaukee a subi et a encaissé 42 points dans la raquette.

En plus de cela, Miami a bénéficié d’un excellent Bam Adebayo aux rebonds, avec 17 prises, dont 6 offensives et un ORB% 6 de 19,5. Avec 12,4 rebonds de moyenne sur ces playoffs, Bam s’impose comme une énorme menace dans la raquette. Il a notamment battu le record de rebonds d’un joueur de Miami en playoffs (19) lors du match 4 face à Indiana.

Complètement dominé aux rebonds niveau statistiques (46 rebonds pour Miami, 34 pour Milwaukee), les Bucks n’ont pris que 14 rebonds en seconde mi-temps, pire total de leur saison ! Miami en a profité, et n’a laissé, sur le match, que 4 petits points sur seconde chance à Milwaukee, malgré les 7 rebonds offensifs des Bucks.

Milwaukee n’a pas utilisé une stratégie défensive ultra efficace sur ce match, et devra s’adapter rapidement avant le Game 2, sous peine d’être une fois de plus dans une situation inconfortable, car Coach Spoelstra sait et va s’adapter.

Cette adaptation du collectif floridien peut faire très mal aux Bucks. Nous parlions plus tôt dans cet article du fait qu’il fallait choisir son poison face à Milwaukee. Miami est différent. Ils s’adaptent au jeu adverse pour offrir le poison le plus mortel possible. Entre profondeur du banc et génie au coaching, Milwaukee a du souci à se faire avant la confrontation de ce soir.

En tout cas, rien n’est fait dans cette série. Le match 1, soldé par une victoire de Miami, a été à la hauteur des espérances et des attentes. La suite de la série ne devrait pas faire exception à la règle et les deux équipes vont nous offrir un excellent spectacle !

Quelques notes sur la 1ère confrontation…

  • Le meneur de jeu des Bucks Eric Bledsoe n’a pas joué le match 1 à cause d’une tension à l’ischio-jambier droit. Son statut est incertain pour le match 2. Il a été remplacé par George Hill, dont l’impact a été faible durant ce match.
  • Côté Miami, 7 jours ont séparés le Game 1 de leur dernier match contre Indiana, contre 2 pour Milwaukee. Fatigue en fin de match ? Avantage sur l’adaptation tactique ? Possible, le run 20-8 en faveur de Miami dans les dernières minutes du match a fait très mal.
  • Milwaukee a subi le rythme imposé par Miami durant toute la seconde mi-temps, avec une moyenne de 14,9 secondes par possession offensive, contre 12,9 secondes en première mi-temps. Jeu lent = jeu moins efficace pour les Bucks…
  • Miami, qui était l’équipe la plus dominante de la ligue sur les handoffs 7 , connaît des débuts de playoffs plutôt compliqués dans ce domaine, avec une adaptation très concrète des équipes adverses. Même si la fréquence augemente, l’efficacité diminue, passant de 1,07 PPP à 0,98 PPP.
  • Les Bucks, adepte du jeu de transition grâce à Giannis, ont eu très peu d’occasions de dérouler rapidement leur jeu dans ce match. A l’aide d’une défense très resserrée sur le repli défensif et très intelligente (fautes faites très tôt, prises à deux succinctes pour dissuader le porteur), Miami a su très souvent ralentir le jeu de Milwaukee.

Sources : NBA.com, inpredictable, Basketball Reference, ESPN.

Lexique :

  1. L’offensive rating (ou ORtg) : statistique inventée pour mesurer l’efficacité offensive d’un joueur. La moyenne NBA se situe entre 105 et 110.
  2. Les points par possession (ou PPP) : statistique prenant en compte le nombre total de points marqués sur le nombre total de possessions.
  3. Un run : période de jeu où une équipe A domine une équipe B en inscrivant beaucoup de points et en encaissant très peu. C’est un véritable passage clé lors d’un match. Le basket-ball est souvent caractérisé comme étant un sport de runs.
  4. Les seeding games : matchs joués à Disney (Orlando) le mois passé afin de définir les places pour les Playoffs et pour la lotterie NBA. Chaque équipe présente à Disney a joué 8 seeding games.
  5. Joueur clutch : joueur doté d’un sang froid hors-norme, capable de faire basculer une rencontre dans les moments les plus chauds et stressants.
  6. Offensive rebound percentage (ou ORB%) : calcul du nombre de possessions offensives d’un joueur se terminant par un rebond offensif. C’est calculé en fonction des rebonds offensifs de son équipe et ceux de l’équipe adverse. La moyenne NBA se situe entre 0 et 5%.
  7. Handoffs : situation de « main-à-main » où le porteur de balle va offrir le ballon à un coéquipier en étant immobile. Pour cela, le coéquipier va venir vers le porteur et va recevoir le ballon une fois qu’il passera à côté du porteur. Situation très utile pour les shooteurs à 3 points afin de les libérer de leur marquage défensif.

3 thoughts on “Comment le Miami Heat a-t-il remporté le Game 1 face aux Bucks ?

  1. La ligne de statistiques de Jimmy est impressionnante, mais son impact est encore plus impressionnant. Il y a une nette différence entre quelqu’un qui compile des statistiques et quelqu’un qui obtient des statistiques en ayant un impact sur le jeu. Quand vous regardez Jimmy jouer, ce ne sont pas ses statistiques qui ressortent, c’est son impact.

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