Chaque semaine Clutch Time vous propose de faire un bond dans le passé afin de revivre et vibrer au rythme d’un fait marquant qui restera dans les annales de la NBA.
Cette semaine, on continue notre série en remontant le temps vers le printemps 1988. La saison NBA livre son verdict final, avec une affiche inédite pour les finales 88 entre nouveauté et classique, les « Bad Boys » de Detroit face aux Lakers « Showtime » de Magic Johnson. Favoris pour le titre, les hommes de Pat Riley sont cependant loin de s’imaginer que les Pistons vont faire trembler la franchise californienne.
Petites histoires entre l’Indiana et le Michigan
Fort Wayne puis Detroit
La ville de Détroit est principalement connu pour sa grande époque industrielle prospère depuis la fin du XIXème siècle, notamment dans l’automobile, ce qui lui vaut d’être au coeur de la « Rust Belt » au nord-est des États-Unis et le surnom de « Motor City ». C’est durant cette période faste que les Pistons de Fort Wayne, jusqu’en 1957, puis de Detroit voient le jour et écrivent les premiers haut-faits de la franchise avec plusieurs finales jouées sans gagner néanmoins le moindre titre. De la splendeur économique du début du siècle, il ne reste plus grand-chose à Motown à la fin des années 70. À l’image de la ville, les Pistons connaissent plusieurs saisons de disette entre 1963 et 1983 malgré la présence successive des futurs Hall of Famers Bailey Howell, Dave DeBusschere, Dave Bing et Bob Lanier.
Il faut donc attendre le début des années 80, et la nomination du regretté Chuck Daly, pour voir les Pistons refaire surface et jouer à nouveau les premiers rôles à l’Est. À cette époque, l’entraîneur de la future Dream Team 92 débarque de l’Ohio pour prendre en main une équipe moribonde qui n’a plus obtenu un bilan équilibré depuis près de dix ans. Évincé par les Cavaliers au cours de l’exercice 1981-82, il n’arrive néanmoins qu’un an plus tard en 1983, rejoignant une jeune connaissance lors de son passage à Cleveland, un certain Bill Laimbeer. Le jeune pivot de l’université de Notre Dame sera la première pierre angulaire de son projet dans le Michigan, mais c’est pourtant un tout autre jeune joueur, drafté en 2nde position à la draft 1981, qui va briller au sein de l’effectif de Daly, un certain Isiah Thomas.
Detroit retrouve des couleurs et les bons bilans offrent l’opportunité aux joueurs de Daly de participer à la post-season dès la saison 1983-84. Éliminés par les Knicks de Bernard King et Cartwright, les Pistons vont osciller durant trois ans entre la quatrième et la cinquième, ne parvenant jamais à passer le second tour des playoffs. Il faudra attendre l’année 1987 et une finale de conférence face aux Celtics de Larry Bird pour voir la ville de Détroit se forger une réputation de joueurs physiques, durs et son vice dans le jeu. Les « Bad Boys » de Détroit sont nés. Très vite leur réputation devient un étendard autour duquel, Bill Laimbeer et Isiah Thomas puis Joe Dumars, John Salley, Dennis Rodman, Rick Mahorn ou encore Vinnie Johnson vont se ranger.
Des débuts prometteurs au devant de la scène
Critiqués pour leurs comportements détestables et un style de jeu à la limite sur le plan défensif, les Pistons parviennent néanmoins à atteindre enfin une finale de conférence. C’est sur cette prouesse que Chuck Daly veut capitaliser en 1987-88. Avec un bilan de 54 victoires pour 28 défaites, Detroit s’offre le meilleur bilan de son histoire en saison régulière, échouant de peu à occuper la première place des Celtics. Fort d’un collectif huilé (sept joueurs en double digits) et emmené par son meneur I.Thomas (all-star), les Pistons peuvent se féliciter de terminer avec la 2nde meilleure défense et la 6ème attaque de la ligue. Elle est surtout devenue, l’équipe avec la plus forte affluence avec plus d’un million de spectateur venus assister aux matchs au Pontiac Silverdome pour la dernière saison de la franchise dans l’enceinte avant son déménagement vers le Palace d’Auburn Hills.
Le parcours des Detroit Pistons durant les playoffs 1988
Les Pistons héritent des Washington Bullets au 1er tour, dans un duel qui s’annonce largement à la portée des hommes de Daly. Pourtant, Detroit démarre fort avec deux succès consécutif (87-96), (101-102) mais se fait surprendre au match 3 (114-106). Autour des Malone (Jeff et Moses), les Bullets évitent un second sweep consécutif face à Détroit et égalise même au match 4 à domicile (103-106). Il faudra les efforts combinés en défense de Thomas (16pts, 11ast), Dumars (20pts) et Dantley (17pts) pour venir à bout de cette équipe (99-78) et en finir avec ce premier tour sans trop de casse.
C’est aux Bulls de Michael Jordan qu’il revient de renverser cette équipe. Isiah Thomas & co. parviennent difficilement à contenir le jeune chicagoan qui envoi près de 28 points par match et offre même une victoire sur le parquet adverse avec 36 pions. L’attention des Pistons se porte alors sur les coéquipiers du numéro 23 qui ne tiendront pas la pression du second tour, laissant Jordan le plus souvent isolé et maltraité par la défense des Pistons. Plus solide défensivement qu’au tour précédent (87 points encaissés), Detroit s’appuie sur un collectif un ton au-dessus (cinq joueurs à dix points ou plus), Isiah Thomas en tête qui culmine à 20 points et 10 assist sur la série, et prendra le meilleur sur Jordan en cinq manches qui vient de se trouver un nouveau rival de taille après deux échecs successifs au 1er tour (en 86 et 87) face aux Celtics.
Les finales de Conférence prennent alors un air de revanche pour Laimbeer & co qui retrouvent leur bourreau de l’année précédente, les Celtics de Bird – McHale – Ainge – Parish. Malmenés au tour précédent par Atlanta, Boston se présente néanmoins avec de solides arguments dans le jeu et des joueurs au top (Bird et McHale culmine à 50 points) Fidèles à leur réputation, les numéros uns à l’Est savent hausser leur rendement et le niveau de jeu en postseason quand cela est nécessaire. Detroit est prévenu, n’ayant pas l’avantage du terrain, ils n’auront pas le droit à l’erreur. Ils remportent le premier match (104-96) grâce à un Isiah Thomas de feu (35 pions et 12 passes) et une défense qui a su maintenir Larry Bird à seulement 20 points et limiter le banc des Celtics à quatre petits points. Frustrés, Boston se réveille au match 2 et prend un match à Detroit (115-119) grâce à ses quatres fantastiques (Parish – Bird – Johnson – McHale) qui inscrit 90 points de la victoire.
De retour au TD Garden, les Celtics sont bien partis pour réitérer le scénario de l’an passé, mais par excès de confiance, la troupe de K.C. Jones perdent l’avantage acquis sur le parquet des Pistons (94-98). Detroit évite l’élimination et malgré la défaite au match suivant (79-78), dans un match âpre défensivement, les Pistons gagnent en confiance et vont finir le travail aux match 5 (102-96) grâce à Thomas (35 points) puis au match 6 (95-90) malgré un K. McHale intenable (33pts, 11 rbd).
Los Angeles, ses stars et ses projecteurs
Los Angeles, cité des anges, du 7ème art, de Disneyland et des Lakers. La mythique franchise californienne peut se féliciter de sa réputation qui va bien au-delà de son sport et des frontières. Depuis son déménagement en 1960 (de Minneapolis), les dirigeants et représentants de la franchise ont tout fait pour placer les violets et or sous les spotlights et rayonner au sein de la ligue. Durant près de trente-ans (de 1960 à 1988), les Lakers participeront ni plus ni moins qu’à quinze finales, ponctuées par cinq titres de champions, soit le plus gros palmarès de la ligue après celui des Boston Celtics (16). Une réussite exceptionnelle incarnée par des joueurs plus brillants les uns que les autres. De Jerry West à Kareem Abdul-Jabbar, en passant par Wilt Chamberlain, Happy Hairston et James Worthy, le Forum d’Inglewood peut se targuer d’avoir abriter un très grand nombre de joueurs all-star sur plusieurs décennies, parmi lesquels un grand nombre de Hall of Famer.
Dans les années 80, il y en a un néanmoins, originaire de l’Illinois (Lansang), qui se démarque du lot, « Magic » E. Johnson. Arrivé à l’aube des années 80 en Californie, le numéro un de la draft 1979 incarne plus que quiconque la réussite californienne durant près d’une décennie, remportant quatre titres NBA avec les Lakers et terminant 3x MVP des Finales et MVP de la saison régulière en 1987. C’est bien évidemment sur les parquets que Magic et ses coéquipiers vont s’illustrer, sous la houlette de Pat Riley, avec un style de jeu inédit qui soulève les foules et bouleverse les codes du basket, c’est la naissance du basket « Showtime ». Armé de ses mains en or et d’une vision de jeu unique, le polyvalent meneur de jeu distribue caviar sur caviar pour ses coéquipiers de l’époque avec une fulgurance et une facilité déconcertante pour les adversaires qui ont toutes les peines du monde à endiguer le jeu des Lakers.
La saison d’après
Auréolé de son premier titre de MVP de saison régulière et d’une quatrième bague de champion, Magic Johnson et les « Angeliños » abordent la saison 1987-88 avec l’ambition de conserver leur titre acquis quelques mois plus tôt. Avec une moyenne de près de 60 victoires par saison depuis l’arrivée du numéro 32, le bastion californien est incontestablement l’un des plus difficile à prendre à l’Ouest. La saison 87-88 sera une de plus un récital (62-20). Pat Riley devenu entre-temps le coach le plus victorieux de l’histoire de la franchise, a de sérieux arguments pour conforter l’idée que ses Lakers demeurent les grands favoris à leur propre succession. Derrière son carré magique Scott – Worthy – Johnson – Abdul-Jabbar , Los Angeles termine 2nd meilleure attaque et 9ème meilleure défense de la ligue et dispose d’une grosse marge de manœuvre à l’image du grand Kareem, du haut de ses 40 piges, qui tourne encore à près de 15 points et 6 rebonds par rencontre ou bien encore du repos accordé à Magic et Worthy à quelques matchs de la fin de la régulière.
Le parcours des LA Lakers durant les playoffs 1988
Pour Pat Riley il s’agit avant tout de ne pas tomber dans l’excès de confiance avec le risque de perdre dès les premières rencontres. Les Lakers se savent attendus dès le premier tour. Face aux Spurs d’Alvin Robertson, sous les ordres de Bob Weiss, l’opposition est clairement déséquilibrée. San Antonio, qui sort d’un bilan famélique de 31 victoires pour 51 défaites, subit en trois manches l’autorité californienne (110-122 ; 112-130 ; 109-107), un ton au-dessus comme le prouve les prestations pleines de maîtrise de Magic Johnson (21 points, 14 passes et 6 rebonds de moyenne) et de ses coéquipiers dont plus de la moitié finissent à dix points ou plus.
Cap désormais sur le second tour et le Jazz d’Utah et de son duo mythique Malone-Stockton. La jeune franchise de Salt Lake City (création en 1974) est une habituée des playoffs depuis quelques temps mais n’a jusqu’alors jamais croisé la route des Lakers. Une première historique qui restera dans les mémoires pour les difficultés auxquelles les hommes de Riley furent confrontés. Malmenés par la défense mise en place par Franck Layden, Johnson et Worthy éprouvent de grandes difficultés dans le jeu néanmoins compensées par le duo Byron Scott (23 points) et Kareem Abdul-Jabbar (12 points, 7 rebonds, 2 contres). Les grands gabarits Malone (28 points, 11 rebonds), Eaton (9 points, 9 rebonds) et Bailey (20 points, 5 rebonds, 2 contres) permettent à Utah de remporter trois matchs (101-97 ; 96-89 ; 108-80), poussant les Lakers au septième match décisif, mais finissent par être éliminés 4 manches à 3 (défaite 109-98). Une série qui se termine tant bien que mal pour Los Angeles, malmenée, mais qui doit mettre en garde les troupes de Riley.
Sur la dernière marche de la Conférence Ouest, Los Angeles retrouve les Dallas Mavericks, une vieille connaissance qui croise de nouveau la route des champions en titre (après 84 et 86). Contrairement à leur voisin de San Antonio, les Mavs vont livrer une prestation d’ensemble très convaincante, poussant les Lakers jusqu’au match 7, les coéquipiers de Magic Johnson seront incapables de remporter le moindre match à l’extérieur (94-106 ; 104-118 ; 105-103) ce qui aurait grandement faciliter la tâche. L’ailier Mark Aguirre (qui signera aux Pistons l’année suivante) brille durant la série avec près de 25 points, 6.5 rebonds et 3 passes par match. À ses côtés D. Harper (17pts, 7.5ast), R. Blackman (16pts, 5ast) et R. Tarpley (16pts, 13rbd) jouent les yeux dans les yeux chaque soir avec les troupes de Riley qui doit son salut au génie de Magic (19pts, 13ast) et au talent de scoreur de Worthy (23pts, 5rbd, 5ast). Les Lakers se sortent du piège tendu par J. MacLeod dans un match décisif (117-102) durant lequel, Worthy, Scott et Magic culmine à 74 points, Johnson approchant de peu le triple-double (24-9-11).
Finales NBA 1988
C’est une affiche pour le moins inattendue et inédite pour les finales 1988. Alors que tout le monde attendait un remake des finales 87 entre les ennemis jurés Celtics – Lakers, c’est bien les impopulaires Pistons de Détroit et le jeu toujours à la limite qui vont goûter pour la première fois de leur histoire au doux parfum des finales NBA. Les Lakers, tenants du titre, sont évidemment favoris pour la partie expérience et talents intrinsèques, mais les Pistons ont de sérieux arguments à faire valoir, à commencer par une solide défense, érigée comme un modèle depuis plusieurs semaines au gré de leur parcours en playoffs jusqu’à leur victoire face à Boston. Les « Bad Boys » de Daly ont gagné en expérience et en niveau de jeu depuis la saison précédente et nul doute que les hommes de Pat Riley vont souffrir entre leurs mains.
Les Pistons ont joué un match de moins aux tours précédents, rien de rédhibitoire donc pour Los Angeles qui peut s’appuyer sur une équipe solide avec des automatismes. À l’image de son pivot Kareem Abdul-Jabbar qui tourne à près de 14 unités par match, les Lakers forts de plusieurs finales ponctuées par quatre titres (trois pour certains) disposent d’un avantage non-négligeable sur leurs adversaires qui restent novices., Magic (20 points, 12 passes) mène l’attaque « angelinos » en alimentant Worthy (21points) et Scott (19.5 points), dirigée d’une main de maître par coach Riley. Chuck Daly s’appuie quant à lui sur une équipe au jeu défensif et les talents de contre-attaquant d’Isiah Thomas (22 points, 9 passes, 3 interceptions) et Adrian Dantley. Par ailleurs Detroit peut se féliciter d’avoir remporté ses deux confrontations en saison régulière face aux Lakers (102-99) et (111-103).
Game 1 & Game 2 au Forum (Inglewood)
Le game 1 tient toute ses promesses, les Pistons décident comme à leur habitude de jouer avec une défense qui étouffe les Lakers qui apparaissent fatigués de leur confrontation face aux Mavs. Johnson (28pts, 8rbd, 10ast) et Scott (25pts, 6rbd) portent tant bien que mal la franchise californienne mais les Pistons prennent dès la fin de la 1ère mi-temps le leadership (57-40) derrière un Dantley monstreux à 34 points et 14 sur 16 aux tirs et un Thomas en mode distribution (19 points, 12 passes). Vinnie Johnson (16 points), jouera le rôle de 6ème homme en finissant le travail offrant ainsi la première manche aux Pistons 105-93.
Une énorme surprise que les Lakers doivent impérativement rectifier au game 2 sous peine d’être déjà hors-course. Los Angeles se reprend et s’impose avec la manière 108-96 pour égaliser à un partout. Worthy (26pts, 10rbd, 6ast), Scott (24pts, 6rbd) et Magic, diminué par une blessure au tendon (23pts, 7rbd, 11ast) concassent la défense des Pistons en première mi-temps limitant les joueurs, champions de l’Est à moins de vingt unités chacun.
Game 3 & Game 4 au Pontiac Silverdome
Direction le Michigan et son Silverdome. Pat Riley a la mauvaise idée de surprendre Detroit sur ses terres d’entrée en reprenant l’avantage du terrain grâce à une deuxième victoire consécutive (99-86). Diminué par une forte fièvre, Magic exécute sa prestation à la perfection, combinant 18 points, 6 rebonds, 14 passes et 3 interceptions et remporter le match dans un duel avec Thomas (28 points, 7 rebonds, 9 passes) esseulé sur le plan offensif. Dans la continuité du game 2, James Worthy (24 points, 9 rebonds) et A.C. Green (21 points, 8 rebonds) sortent de la boîte pour crucifier Detroit dans le 3ème quart-temps (31-18).
Detroit, touchée mais pas atteinte, se ressaisit au match suivant et à l’orgueil égalise dans la série à deux partout (111-86) avec la manière qui plus est. À l’initiative de son leader Bill Laimbeer, quelque chose se débloque alors dans le jeu des Pistons qui passent d’un jeu essentiellement défensif à une attaque exceptionnelle, forçant les Lakers à revoir leur stratégie, privés très tôt dans le match de son maestro, Magic (23 points, 6 passes), pour s’être mit dans la pénalité, les Lakers se retrouvent comme un poulet sans tête et se font broyer par des Pistons intenables, Dantley en tête, qui culmine à 27 unités et Thomas se fendant quasiment d’un triple-double (10pts, 9rbd, 12ast).
Game 5
Le match cinq s’annonce déjà comme décisif, dans une salle bouillante et en guise d’adieu, les Pistons sont tout proche de ramener leur premier titre avec une deuxième victoire de suite (104-94) devant près de 42 000 spectateurs et une hystérie collective. En jouant la carte de l’intimidation, les Lakers pensent avoir fait un break en inscrivant les premiers points du match grâce à un KAJ qui rajeunit (26 points, 6 rebonds) et un Magic Johnson en mode distributeur (15pts, 17ast, 6rbd), mais c’était sans compter sur l’opiniâtreté des « Bad Boys » qui ne se laissent pas marcher sur leurs platebandes. Dantley (25pts, 7rbd), Dumars (19pts), Laimbeer (8pts, 11rbds) et le sixième homme Johnson qui scorera 12 de ses 16 points en 1ère mi-temps, suivi de Thomas (15pts, 5rbd, 8ast), se relayent pour arracher l’avantage et mener 3-2 dans des finales aussi indécises que palpitantes. Les Pistons quittent leur arène sur une dernière victoire avant peut-être un premier sacre.
Game 6
Le game 6 restera indubitablement comme le plus marquant et controversé dans la rivalité Pistons-Lakers. Au bord du gouffre, les Lakers doivent impérativement se ressaisir une nouvelle fois pour rester en vie. Detroit ne l’entend pas de cette oreille et un homme va éclabousser la rencontre de toute sa classe. Isiah Thomas sort une prestation inoubliable avec pas moins de 43 points inscrits (ainsi que huit passes et six interceptions, rien que ça !) pour recoller petit à petit au score et mettre son équipe dans une position favorable dans le dernier quart temps pour remporter ce match 6 décisif. En scorant quatorze points consécutifs pour les Pistons dans le 3ème quart temps, Thomas et ses coéquipiers se sortent d’une situation compliquée, menés (56-48) pour revenir à 70-64. Avec moins de cinq minutes à jouer, Thomas se blesse maladroitement la cheville droite sur une bataille au rebond. Tel un guerrier des temps moderne, Isiah revient sur le parquet. Il termine avec 25 points sur le seul 3ème quart temps et permet aux Pistons de mener 81-79.
Du début à la fin le quatrième quart temps sera serré. Blessé à la cheville, Isiah Thomas inscrit deux lancers supplémentaires à moins d’une minute de la fin offrant à son équipe une courte mais précieuse avance (100-99). De Dennis Rodman à Joe Dumars en passant par Laimbeer, les Pistons jouent le tout pour le tout avec audace ils maintiennent leur avantage jusqu’à une faute « fantôme » sifflée pour Abdul-Jabbar sur un contact avec Laimbeer. KAJ rentre ses deux lancers. Avec quatorze secondes à jouer, Los Angeles repasse devant (103-102) et Chuck Daly demande un temps mort pour préparer l’action de la gagne. Une dernière possession chahutée par la défense californienne qui récupère la gonfle après un sauvetage en équilibre de Byron Scott qui est violemment poussé en touche par Dennis Rodman. Avec deux nouveaux lancer-francs, les Lakers peuvent définitivement tuer le match. Scott manque ses deux lancers mais avec moins de deux secondes au tableau d’affichage, Detroit ne reviendra pas et s’incline 103 à 102.
Game 7
Les Pistons doivent impérativement effacer la frustration du game 6 et retrouver leur allant qui leur a permis d’atteindre ce stade en finale. La tâche s’annonce très compliqué, mais pas impossible car la franchise du Michigan joue quasiment sur le même pied d’égalité avec les Lakers depuis le début des finales. Dans un format 2-3-2, Los Angeles peut conclure à domicile ce match 7 qui s’annonce géant. Toujours gêné par sa cheville, le meneur boite pas mal lors des échauffements mais persiste à jouer (qui lui en voudrait). Inscrivant dix des 42 points de son équipe à la mi-temps, il est contraint de renoncer à terminer le match au retour des vestiaires, la douleur étant insupportable. Privés de leur leader, les Pistons s’en remettent une fois encore à leurs fondamentaux. Joe Dumars prend le relais de Thomas pour scorer 25 points (ainsi que cinq rebonds et quatre passes), secondé par A. Dantley (16pts) et le banc des Pistons (42 points, dont 17 pour le seul John Salley). Insuffisant cependant pour stopper les Lakers bien décidés à finir le boulot. Menés (90-75) à l’aube de la dernière manche, Detroit est malmené, notamment par les remplaçants Michael Cooper et Mychal Thompson (douze points chacun) qui sortent leurs perfs de l’année pile au bon moment.
Mais les « Bad Boys » n’abdique jamais. Chuck Daly tente le pari d’aligner Rodman – Salley – Dumars et Johnson sur le parquet et prive ainsi les Los Angeles de solutions. Mangés dans les uns-contre-uns, les Lakers balbutient leur basket et se retrouvent une fois encore en grande souffrance, Salley concluant ainsi un énorme run des Pistons pour porter le score à 98-92 avec encore près de quatre minutes à jouer. Stupeur au Forum, les fans des Lakers s’inquiètent de ce come-back et à moins d’une minute trente secondes, Dumars, d’un jump shot et revient à deux petits points (102-100). Incroyable revirement de situation pour les Lakers et Magic (19pts, 14ast) qui peut néanmoins compter sur un James Worthy all-time, en triple-double (36pts, 16rbd, 10ast) et un Byron Scott à 21 points. Magic puis Byron Scott redonne un avantage de cinq points aux Lakers (105-100) suivi d’un rapproché immédiat d’un layup de Dumars suivi d’un trois points salvateurs de Laimbeer. Après deux nouveaux lancers de A.C. Green, Thomas, de nouveau sur le terrain, ne peut empêcher la victoire des Lakers, sur une tentative de passe désespérée récupérée par Los Angeles. L’horloge qui défile toujours, le parquet est rapidement envahi par les supporters et les finales 1988 s’arrêtent sur un nouveau succès des Lakers 108 à 105.
La fin d’une époque et le début de quelque chose
Le dénouement est cruel pour Detroit qui a bataillé jusqu’au bout des sept matchs et que personne ne voyait aller aussi loin et être aussi proche du titre. Plusieurs voix s’élevèrent néanmoins sur le contenu des deux dernières rencontres au Forum, à commencer par le match 6 qui fut pointé du doigt pour ses erreurs d’arbitrage et ses fautes sifflées, notamment celle de Laimbeer sur Abdul-Jabbar, qui ont très certainement coûté la victoire aux Pistons, les privant ainsi d’un premier titre. Le match décisif fut lui aussi au cœur de la tempête, au moment du buzzer final, la foule ayant déjà envahi le terrain, les arbitres n’auraient-ils pas dû évacuer le parquet le temps de siffler la fin du match en bonne et due forme ? Difficile cependant de trouver plus de circonstances atténuantes aux Pistons qui avaient déjà beaucoup donné depuis les matchs contre les Celtics, jusqu’à ce septième et ultime match en finale.
Les Lakers furent, si ce n’est meilleurs, tout du moins à la hauteur de l’évènement, réalisant le fameux back-to-back, chose qui n’avait plus été réalisée depuis les Boston Celtics de Bill Russell à la fin des années soixante. James Worthy (22 points, 7.4 rebonds et 4.4 passes) fut sacré MVP des Finales pour l’ensemble de son œuvre, avec comme point d’orgue son incroyable triple-double au match 7. Magic (21 points, 5.7 rebonds et 13 passes de moyenne), Abdul-Jabbar et Cooper remportèrent leur cinquième titre avec les Lakers en à peine dix ans, installant un peu plus la dynastie « Showtime » au panthéon des plus grandes équipes du sport américain. Le pivot aux six bagues se rapprochera un peu plus de la retraite avant de définitivement mettre un terme à une carrière exceptionnelle en 1989, deux ans avant l’annonce de la séropositivité de Magic Johnson qui mettra un terme à sa carrière pendant un moment.
Les Pistons n’ont pas démérité à l’image de son meneur de jeu, Isiah Thomas, qui se força à jouer malgré une cheville endolorie et termina avec près de 20 points, 10 passes et 3 interceptions par match. Detroit prendra dès la saison suivante une éclatante revanche sur Los Angeles et Pat Riley en sweapant en finale des Lakers en bout de cycle, effaçant un peu plus le traumatisme des finales de 1988. Toutefois l’histoire retiendra que durant le mois de juin de cette année, les Pistons auraient pu inverser le court des évènements en remportant le titre un an plus tôt, ouvrant ainsi la possibilité d’un triplé historique entre 1988 et 1990 au grand dam des fans des « Bad Boys » de Detroit. Néanmoins Detroit ne parvint pas à se maintenir dans la course durant les années 90, éliminés en finale de conférence en 1991 par sa majesté Michael Jordan, qui tiendra sa revanche sur l’équipe qui l’a tant fait souffrir à la fin des années 80.